Paris,
22 juillet 1949
Mon cher vieux,
nous sommes en pleine vache enragée,
le diable par la queue,
même pas le strict nécessaire et,
bien entendu,
il ne saurait être question d'acheter des timbres postes.
J'ajoute que nous ne pouvons plus vendre des bouteilles vides,
comme faisait Baudelaire,
car il ne nous en reste plus une.
Je te prie de ne jamais oublier de mettre des
timbres postes si tu veux que je te réponde.
Le sort de Jeanne et de Marcel me tourmente au plus haut point.
Ces trois derniers jours,
des amis sont intervenus avec du pain,
mais cela ne durera pas aussi
longtemps que les impôts.
Je t'avoue mon ennui le plus extrême.
Bien entendu,
je n'ai pas touché à la plume et je n'ai rien lu excepté tes lettres.
Je t'embrasse,
George.